Hommes politiques kabyles

Colonel Amirouche Aït Hamouda

 

Amirouche Aït Hamouda, plus connu sous le nom de Colonel Amirouche, est un colonel de l'Armée de Libération Nationale, né en 1926 dans le village de Tassaft Ouguemoune (faisant actuellement partie de la commune d'Iboudraren) dans les montagnes du Djurdjura en Kabylie (Algérie). Fils posthume d'Amirouche Aït Hamouda et Fatima Aït Mendès.

Initié au militantisme par Bachir Boumaza au lendemain de la Seconde Guerre mondiale sur le chantier de construction du barrage de Kherrata, il s'installe à Relizane (ouest de l'Algérie) où son activité et son courage physique font l'admiration des militants de la cause nationale. A la création de l'O.S (Organisation Spéciale), groupe paramilitaire chargé de la préparation des combattants pour la lutte armée, il est l'adjoint de Ounès Benattia auquel il succède après l'arrestation de ce dernier.

En 1950, sur ordre de ses chefs, et dans le cadre de la crise profonde qui secoue alors le mouvement national, il quitte l'Algérie pour la France où son engagement dans les rangs des durs lui vaut un passage à tabac qui le laisse pour mort après un meeting houleux à la Mutualité à Paris. Il y reste jusqu'en septembre 1954 date à laquelle il revient en Algérie et participe à la préparation du déclenchement de la lutte armée aux environs de l'Arbâa des Ouacifs où il est initié au maniement des explosifs par Mokhtar Kaci-Abdallah.

Le premier novembre 1954, il entre dans la clandestinité sous les ordres de Amar Aït Chikh et assiste en 1955, impuissant, au simulacre de procès, organisé, à l'instigation de Krim Belkacem, qui aboutit à l'assassinat d' Amar Ould Hamouda (figure connue du mouvement national). Dur au mal, infatigable, habile tacticien, il gravit rapidement les échelons de la hiérarchie jusqu'au grade de commandant.

C'est à ce titre, et en qualité de responsable de la zone de la Soummam en basse Kabylie, qu'il assure la sécurité du Congrès de La Soummam qui jettera les bases idéologiques du combat libérateur et assoira le socle de l'État Algérien moderne.

Lors de la crise de la Wilaya 1, après la mort de Mostefa Ben Boulaïd et la liquidation de chefs prestigieux tels Abbas Laghrour, Bachir Chihani et quelques autres, il est chargé par le CNRA (Conseil National de la Révolution Algérienne) de remettre de l'ordre dans les rangs des combattants. Il s'acquitte avec brio de cette mission et redonne à la Wilaya 1 son unité perdue et récupère, en lui sauvant la vie, le futur colonel Haouès (Ahmed Ben Abderrazzak).

Lors du départ de Saïd Mohammedi vers l'extérieur, le conseil de Wilaya le désigne comme successeur, ce qu'il refuse pour ne pas violer la règle de l'ALN qui exige que le poste revienne à l'officier le plus ancien dans le grade, en l'occurrence, Saïd Yazouren dit Vrirouche. Ce dernier, envoyé à Tunis, y est maintenu pour permettre la désignation d'Amirouche au grade de colonel.

L'épisode douloureux du complot dit de "la bleuite" affecte profondément la wilaya 3 et donne lieu à des liquidations physiques massives au sein des unités combattantes. Grâce à l'abnégation d'adjoints prestigieux, tels les commandants Ahcène Mahiuoz, H'Mimi (Ahmed Feddal), Moh Ouali (Slimani Mohand Ouali), Ali Azzi, Lamara Hamel, il remet en route les unités combattantes mais souffre de l'absence totale d'approvisionnement en armes en provenance de l'extérieur. Il décide alors, avec le colonel Haouès de se rendre à Tunis demander des comptes au GPRA (Gouvernement Provisoire de la République Algérienne) et envoie une mission d'approche vers la Wilaya 2 dont le chef, le colonel Ali Kafi avise Lakhdar Bentobbal de l'arrivée prochaine des colonels. Ce dernier avise Krim Belkacem et Abdelhafid Boussouf et ils décident ensemble de laisser le temps au service français du chiffre de décoder les messages de l'ALN.

Suivi à la trace par les troupes françaises, le groupe des colonels, escortés par le commandant Amor Driss, tombe dans une embuscade mortelle au lieu dit Djebel Thameur le 29 mars 1959.

Krim Belkacem

 
 
Krim Belkacem est un révolutionnaire algérien et un des dirigeants du Front de libération nationale. Né le 14 septembre 1922 à Draâ El Mizan en Kabylie, il a été assassiné à Francfort le 18 octobre 1970.
Titulaire d'un certificat d'études à Alger, Krim Belkacem obtient un emploi auprès de la municipalité de Draa al Mizan. Son père, inquiet de l'intérêt de son fils pour les idées nationalistes, hâte son passage sous les drapeaux. Le jeune homme se retrouve mobilisé en 1943 dans le 1er Régiment des Tirailleurs Algériens où il est promu caporal-chef.

Démobilisé, Krim Belkacem adhère au PPA (Parti populaire algérien). Les autorités françaises se rendant compte de son influence sur la population le convoque le 23 mars 1947 pour atteinte à la souveraineté de l'État. Aprés avoir pris l'avis du P.P.A, il prend le maquis. Des menaces et des mesures de rétorsion sont exercés sur son père qui refuse de livrer son fils. En représailles, il dresse une embuscade contre le caïd (son propre cousin) et le garde-champétre. Le garde-champétre est tué. En 1947 et 1950 il est jugé pour différents meurtres et condamné à mort par contumace. Il devient responsable du P.P.A-M.T.L.D pour toute la Kabylie et à la tête des 22 maquisards qui composent son état-major et multiplie les contacts directs avec les militants et la population.

Son plus proche collaborateur est Amar Ouamrane. Le 9 juin 1954, Krim rencontre à Alger Ben Boulaid, puis Boudiaf et Didouche, qui parviennent à le convaincre de la nécessité d'une troisième force.

Il passe un accord avec les cinq responsables du groupe des 22 rompt avec Messali en août 1954, sans tenir au courant les militants de son initiative. Devenu le sixième membre de la direction intérieure du F.L.N les six chefs historiques, Krim est le responsable de la zone de Kabylie au moment du déclenchement de l'insurrection, le 1er novembre 1954.

Il entre au C.E.E au lendemain du congrès de la Soummam en 1956 et domine le F.L.N-A.L.N en 1958-1959 comme vice-président du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) et ministre des Forces armées.

Belkacem, qui a quitté l'Algérie après la bataille d'Alger, est alors allié à Ben Tobbal et Abdelhafid Boussouf contre Abane Ramdane. Vice-président du Conseil et ministre des Forces armées du GPRA en 1958, ministre des Affaires étrangères en 1960, de l'intérieur en 1961, il entame les négociations avec la France Accords d'Évian en 1962.

Les accords d’Evian signés le 18 mars 1962, mettaient fin à 132 années de présence française en Algérie.

Réunis du 7 au 18 mars 1962, les délégations algérienne menée par Krim Belkacem (alors vice-président et ministre de l’intérieur du GPRA) et française menée par Louis Joxe (ministre chargé des affaires algériennes), ont signé un document de 93 pages où furent consignés bien sur le cessez-le-feu, mais aussi un cadre pour les futures relations franco-algériennes.

 

 Il s’agit notamment du statut de la minorité européenne d’Algérie, de l’amnistie, du Sahara, de la base militaire de Mers El Kebir…

 

 Belkacem s'oppose à la création, par Ahmed Ben Bella, Houari Boumedienne et Mohamed Khider, du bureau politique du FLN. Il ne tarde pas à être forcé de se retirer. Après le coup d'État du 19 juin 1965, Krim Belkacem revient en politique dans l'opposition à la dictature. Accusé d'avoir organisé une tentative d'assassinat contre Boumedienne il est condamné à mort par contumace par la justice algérienne. Exilé à Francfort, Krim Belkacem y est assassiné le 18 octobre 1970; probablement avec la complicité des services secrets algériens de l'époque. Belkacem a été réhabilité. Depuis le 24 octobre 1984 il repose au Carré des Martyrs.

 

Abane Ramdane

Abane Ramdane
Né en 1920 à azouza, village de Larbaa Nath Irathen (Tizi Ouzou) en Kabylie (Algérie). Issu d'une famille modeste, Abane Ramdane obtient le Baccalauréat en 1941au lycée Duverier de Blida. Il est d'abord sous-officier dans l'armée francaise pendant la Seconde Guerre mondiale. En 1943, il entre au PPA et à l'OS.

Arreté en 1951, Abane Ramdane est condamné à 6 ans de prison d'ou il organise une série de grèves. Libéré en 1955, il rejoint aussitôt le FLN. Il trace alors les grandes lignes du mouvement révolutionnaire et est organise le congrès de La Soummam. Les grandes lignes de son projet consistent à créer un État dans lequel l'élément politique l'emporte sur l'élément militaire. Abane Ramdane a également opté pour le pluralisme politique et linguistique en Algérie. Principal organisateur avec Ben M'hidi du congrés de la Soummam le 20 Aout 56, Abane Ramdane etait connu comme un fin politicien, mais son franc-parler et sa grande instruction, outre sa vision moderne de la future Algerie indépendante lui valent des inimitiés. Victime des luttes internes entres les colonels, partisans du pouvoir militaire, et les défenseurs du primat accordé au politique, Abane Ramdane est isolé puis attiré dans un guet-apens au Maroc. Sur l'ordre des "colonels" du CCE , notamment Lakhdar Ben Tobbal, Abdelhafid Boussouf et Belkacem Krim, Abane y est étranglé le 26 décembre 1957. Belkacem Krim niera plus tard avoir approuvé le projet de la liquidation d'Abane. En fait, une vingtaine de dirigeants de l'epoque dont Ahmed Ben Bella avaient approuvé l'execution de cet heros national dont le projet de societé reste toujours à construire.

 

 

Didouche Mourad

Didouche Mourad
Didouche Mourad est un des héros de la Guerre d'indépendance d'Algérie.

Didouche Mourad naît le 13 juillet 1927 à El Mouradia à Alger au sein d'une famille modeste venue de Kabylie, effectue ses études primaires ainsi que le cycle moyen à l'école d'El Mouradia puis rejoignit le lycée technique du Ruisseau.

Nourrissant dès son jeune âge une haine farouche envers le colonialisme qui fait naître en lui le désir de venger ses compatriotes, il s'engage, dès 1942, dans les rangs du Parti du peuple algérien alors qu'il n'avait pas encore atteint l'âge de 16 ans.

Surnommé « Si Abdelkader », il est nommé responsable des quartiers d'El Mouradia, El Madania et Birmandreis et crée en 1946, la troupe de Scouts « al amal » ainsi que l'équipe sportive « al-sarie al-riadhi » d'Alger.

En 1947, il organise les élections municipales dans sa zone. Il est parmi les membres les plus éminents de l'Organisation spéciale (OS).

Lors de la découverte de ses responsabilités au sein de l'organisation en mars 1950, et après l'échec de l'administration française à le capturer, un jugement par contumace est prononcé contre lui, le condamnant à 10 ans de prison. Il constitua en 1952, avec Ben Boulaïd, un noyau clandestin dans Alger dont la mission était la fabrication de bombes en prévision du déclenchement de la « Révolution Nationale ».

Il se rend ensuite en France avec pour mission le contrôle interne de la Fédération. À son retour à Alger, il mit en place avec huit compagnons le Comité révolutionnaire pour l’unité et l’action. Il participe également à la réunion des « 22 » tenue en juin 1954, au cours de laquelle est décidé le déclenchement de la Révolution. De cette réunion, émerge le premier "Conseil de la Révolution", composé de 5 membres dont Didouche Mourad, lequel est nommé responsable de la zone II (Wilaya II).

Il est l’un des plus éminents rédacteurs de la Déclaration du 1er novembre 1954 et réussit avec l’aide de son adjoint Zighout Youcef, à jeter les bases d’une organisation politico-militaire.

Le 18 janvier 1955, alors qu’il n’avait pas encore 28 ans, Didouche Mourad meurt à la bataille du douar Souadek. Il est ainsi le premier chef de zone à tomber au champ d’honneur.

 

Hocine Aït Ahmed

Hocine Aït Ahmed
Hocine Aït Ahmed est un homme politique algérien né le 20 août 1926 à Ain El Hamam en Kabylie.

Docteur en droit, il est l'un des principaux chefs du Front de libération nationale (FLN). Aït Ahmed démissionne du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) et de tous les organismes du nouveau pouvoir la crise de l'été 1962. En septembre 1963 il fonde le Front des forces socialistes (FFS) qui réclame le pluralisme politique face au verrouillage de la vie politique imposé par le système du Parti unique.

Arrêté et condamné à mort en 1964, il s'évade de la prison d'El Harrach en mai 1966. Exilé en Suisse, il rentre en Algérie après les émeutes de 1988 mais quitte de nouveau son pays après l'assassinat de Mohamed Boudiaf en 1992. Il reviendra à plusieurs reprises en Algérie, notamment à l'occasion du 50e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération (1er novembre 1954).

À 16 ans, encore lycéen, il adhère au Parti du peuple algérien (PPA). Il devient, rapidement, le plus jeune membre du Comité central auquel il présente, en 1948, un rapport décisif sur les formes et la stratégie de la lutte armée pour l’indépendance.

Lors du congrès clandestin du PPA tenu à Belcourt en 1947, il avait déjà préconisé la création d'une Organisation spéciale (OS) chargée de la formation des cadres militaires et de la mise en place d’un dispositif clandestin pour initier et développer la lutte armée.

Désigné par le Comité central du PPA au Bureau politique, il se voit confié la direction de l'OS, en remplacement de Mohamed Belouizad, atteint de tuberculose. Durant deux ans, il a mis en place - à l’échelle nationale - les structures pour la formation politiquue et militaire pour mener à bien la guerre de libération.

C’est dans ce contexte qu’il organise le hold-up de la poste d’Oran, qui permit, en mars 1949, de s’emparer d’une importante somme d’argent, sans effusion de sang.

L’aile ‘légaliste’ des instances dirigeantes du PPA-MTLD (Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques), exclut pour « berbérisme » Aït Ahmed et porte Ahmed Ben Bella à la tête de l’OS, dont il était le responsable en Oranie.
La découverte de l'OS par les services de renseignement français précipite la dissolution de l'OS.

Le 1er mai 1952 Aït Ahmed s'installe au Caire. Recherché par les autorités françaises, il est désigné membre de la délégation du PPA-MTLD, en exil au Caire. Aït Ahmed insiste sur l'importance de la diplomatie pour donner une visibilité politique au plan international du mouvement e libération.

Il assiste à la première Conférence des partis socialistes asiatiques, réunie en janvier 1953 à Rangoon en Birmanie. L’une des premières résolutions adoptée par cette organisation d'inspiration marxiste consiste à soutenir la lutte de libération du Maghreb. La Conférence met en place un bureau anti-colonial dont le rôle, notamment, est de suivre les luttes anti-coloniales auprès de l'Organisation des Nations unies (ONU).

Aït Ahmed se rend au Pakistan, en Inde et en Indonésie pour créer des Comités de soutien à la cause de l'indépendance algérienne.

En avril 1955, il dirige la délégation algérienne à la Conférence de Bandung. Les résolutions prises par cette Conférence en faveur du droit à l’autodétermination et à l’indépendance des trois pays du Maghreb ont été préparées par les trois partis nationalistes (Tunisie, Maroc, Algérie) qui ont su mener une action commune sur la base d’un ‘Mémorandum Maghrébin’.

En avril 1956, il ouvre et dirige le bureau de la délégation du FLN à New York. En septembre 1955, le problème algérien est inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée générale de l'ONU. Ce qui provoque le retrait retentissant de la délégation française, présidée par le Premier ministre Antoine Pinay.

En octobre 1956, Aït Ahmed est arrêté par les autorités française, en compagnie de Mohamed Boudiaf, Mohamed Khider, Ahmed Ben Bella et Mostefa Lacheref, dans l’avion qui les conduisait du Maroc à Tunis où devait se tenir une Conférence maghrébine de la Paix.

Tout au long de sa détention, Aït Ahmed communique avec les dirigeants du FLN-ALN (Armée de Libération Nationale) (voir “La guerre et l’après guerre”, éditions de Minuit, 1963, Paris). Dans la plus importante de ces communications, Aït Ahmed en appelle avec urgence à la création d’un Gouvernement provisoire en exil. Il considère que cette initiative peut contribuer à résorber la crise interne suscitée par des responsables qui s’opposent au Congrès de la Soummam, (tenu en août 1956) et préparent un congrès antagoniste.

Membre du Conseil National de la Révolution algérienne (CNRA) et du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), Hocine Aït Ahmed, dès sa libération, en 1962, prend une position ferme contre la violence de l’Etat-major des frontières. Il met en garde les notables politiques contre un processus de crise qui risque de dégénérer en guerre civile .

Il dénonce le groupe de Tlemcen et le groupe Tizi-Ouzou. Il appelle les forces d’avant-gardes – femmes, syndicats, étudiants etc. – pour faire barrage aux affrontements autodestructeurs. Les grandes manifestations populaires au cri de «Sbaa snin barakat!» (Sept ans cela suffit !) avaient pu interrompre momentanément ces violences.

Elu membre de l’Assemblée nationale constituante (ANC) - sur une liste unique de candidats dont il dénonce le principe -, il accepte néanmoins d’y siéger pour un double objectif. Premièrement s’efforcer d’initier à partir de cette institution une vie politique avec des débats publiques en y associant la société. Deuxièmement veiller à ce que la commission chargée d’élaborer la constitution au sein de l’ANC termine son projet de constitution et le soumette aux débats libres et démocratiques des « élus » de la nation. Il fallait que l’ANC adopte la projet de constitution dans les délais légaux afin de le soumettre au corps électoral par voie référendaire.

Le FLN refusant la démocratisation, Ferhat Abbas, président de l'Assemblée Constituante baffouée, démissionne. Plusieurs députés suivent son exemple dont Aït Ahmed qui fonde alors, en septembre 1963, le Front des forces socialistes (FFS).
La répression du FLN s’abat sur la Kabylie et présente le FFS comme un mouvement séparatiste.

Alors que des violences de l'armée contre la population civil se poursuivent, des maquis de résistance s'organisent. Les tentatives de consiliation du FFS échouent ne permettant pas d'éviter la poursuite des massacres et l'installation de la dictature. Arrêté en octobre 1964, Aït Ahmed est condamné à mort, puis gracié. Il est mis en prison à Lambèse.

Voulant écarter Houari Boumediene, le Président Ahmed Ben Bella prétend vouloir s’ouvrir à la société et entrer dans un processus de négociation avec le FFS. Suite à des négociations menées à l’étranger, le FLN (Parti unique) et le FFS parviennent à un accord, qui sera rendu public par la presse nationale le 16 juin 1965.

Trois jours plus tard (le 19 juin 1965), le coup d’Etat, perpétré par Houari Boumediene met fin aux espoirs de voir le pluralisme et la démocratie d'instaurer en Algérie.

Le 1er mai 1966, Aït Ahmed s’évade de la prison d’El Harrach, et se réfugie en Suisse. Il n'a de cesse de militer pour la promotion et la défense des droits de l’homme et pour l’unité du Maghreb.

Il obtient sa licence en droit à Lausanne en Suisse. Puis, il soutient une thèse de doctorat, à Nancy, en 1975, sur «Les droits de l’homme dans la Charte et la pratique de l’OUA».

À l’occasion du «Printemps berbère» (1980), il joue avec le FFS un rôle modérateur d'encadrement politique des militants afin d’empêcher l’irruption de la violence et inscrire la revendications linguistique et culturelle dans l’exigence du pluralisme politique au niveau national.

Le 16 décembre 1985 il lance avec Ahmed Ben Bella un appel au peuple algérien pour l’instauration de la démocratie et le respect des droits de l’homme est lancé depuis Londres. Les deux anciens du FLN font de la restitution au peuple algérien de son droit à l’autodétermination la pierre angulaire d’une «Alternative démocratique».

Les événements sanglants d’octobre 1988 et ses répercussions internationales pousse la dictature algérienne a un semblant d'ouverture.
Aït Ahmed rentre en Algérie en novembre 1989. Après plusieurs péripéties, le FFS est finalement reconnu.

À l’occasion de l’annulation du premier tour des élections législatives de 1991, Hocine Aït-Ahmed met en garde contre le danger de voir les armes prendre le pas sur les urnes. Son parti organise, le 2 janvier 1992, la plus grande manifestation que la capitale ait connu depuis l’indépendance, avec pour credo «Ni État policier, ni République intégriste».

En juin 1992, une semaine avant l’assassinat de Mohamed Boudiaf, Aït Ahmed propose une Conférence nationale destinée à promouvoir une sortie de crise sur le modèle sud-africain.

Après l’assassinat de Boudiaf, le climat de terreur et le verrouillage total de la vie publique s'aggravant, Aït Ahmed préfère s'exiler pour continuer à mener son combat.

En 1995, Aït Ahmed signe à Rome, avec les représentants de six autres formations et des personnalités politiques, une plate-forme pour la sortie de la crise et le retour à la paix.

Les signataires du "contrat national de Rome" s'entendent sur un contrat politique constitué d'un ensemble d’engagements dont les plus importants sont l’alternance au pouvoir, la liberté de culte, la primauté de la loi légitime sur tout autre loi issue d’assemblées non élues légitimement, l’égalité des citoyens sans distinction d’aucune sorte, l’accession au pouvoir par des moyens pacifiques, le rejet de la violence pour se maintenir au pouvoir ou pour y parvenir.

Le 2 février 1999, il est de nouveau en Algérie. Sa candidature à l’élection présidentielle est annoncée trois jours plus tard.

Après une campagne électorale menée à travers tout le pays, il décide, avec Six autres candidats, de se retirer de l'élection. Ils dénoncent la fraude qui, selon eux, a déjà commencé. Abdelaziz Bouteflika est élu avec une forte majorité.

Victime d’un infarctus, Aït Ahmed est transféré en Suisse à l’hôpital de Lausanne pour y être opéré. Après sa convalescence, il a repris toutes ses activité au sein du FFS.

Aït Ahmed poursuit son combat politique pour contribuer à sortir l’Algérie de l'omerta' internationale dont est victime le peuple algérien. Le FFS reste l'un des plus importants parti politique d'opposition.

 

André  Ali  MECILI.

 

André Mécili naît à la fin de 1940 de parents kabyles établis à Koléa, dans la MitidjaSon père, originaire de Djemaa-Saaridj, est garde-champêtre, sa mère postière. Ils ont pris, par naturalisation, la nationalite française : lui-même la reçoit de naissance, par filiation.

Ses études conduisent le garçon du collège de Boufarik au lycée de Ben Aknoun, où il rejoint la cellule du FLN. La petite ferme acquise par ses parents à Chaïba est un refuge pour les maquisards et le jeune Mécili est rapidement impliqué dans des tâches de liaison et de pourvoyeur de caches. Pour ses camarades, il choisit de se prénommer Ali.

La fin de l'année 1960 est marquée dans les principales villes d'Algérie par de grandes manifestations populaires de soutien au FLN. À Alger, Ali Mécili et ses camarades lycéens participent au service d'ordre et assurent les relations avec la presse française. À la même époque, les vingt ans du jeune homme lui valent d'être appelé sous les drapeaux pour faire ses classes : il fuit le territoire pour rejoindre, via Marseille et l'Italie, les troupes algériennes basées en Tunisie.

L'expérience du MALG.

À Tunis, c'est le Ministère de l'Armement et des Liaisons générales (MALG), le service de renseignement de l'ALN, qui détient la haute main sur le filtrage et l'aiguillage des nouvelles recrues. Mécili y est incorporé d'office et rapidement transféré vers la Base Didouche, dans la banlieue de Tripoli. Quelques semaines plus tard, il est porté avec le grade de Lieutenant à la tête de l'une des deux sections de la base, chargée des activités d'espionnage à l'étranger.

En dépit de cette rapide prise de responsabilités, le bilan qu'André Mécili tire de son expérience est sombre : « j'ai connu les poux et les punaises, la saleté, l'hypocrisie, la bassesse humaine, les exécutions sommaires de ceux qui n'ont rien fait de mal et qui ne pourront plus rien faire. J'ai connu la honte, la peur, l'épuisement, le défaitisme, en d'autres termes, j'ai connu l'homme, à nu ».

À l'été 1962, l'independance acquise, les effectifs du MALG sont envoyés sur Alger pour y soutenir l'alliance formée par le Bureau politique et le groupe de Tlemcen contre celui de Tizi-Ouzou. Les camions contournent les wilayas 2 et 3, hostiles, pour rejoindre la capitale par l'ouest. À proximité d'Orléansville (aujourd'hui Chlef), Mécili s'échappe du convoi. Il prend contact avec les officiers de sa région, la wilaya 4, qu'il avertit des risques de transformation du MALG en police politique.

Un opposant dans les « services »

Autour de l'ancienne « zone autonome d'Alger », des mouvements d'étudiants, de syndicalistes, de femmes et de jeunes s'organisent pour tenter de maintenir la paix civile face à l'affrontement des alliances politico-militaires rivales. Avec eux, Ali Mécili s'investit dans les manifestations de masse qui proclament à l'adresse des chefs du FLN : « Sept ans, ça suffit ! » À l'automne 1962, il prend contact avec Hocine Aït Ahmed qui, de la tribune de l'Assemblée constituante, cherche à préserver les possibilités d'un débat politique pacifique et ouvert.

En septembre 1963, les deux hommes se retrouvent pour la création du Front des forces socialistes (FFS). Mécili prend en charge l'impression et la diffusion de la propagande du nouveau parti. Très proche des milieux étudiants, il y impulse la constitution d'un courant favorable à la démocratie et à l'autonomie syndicale, face à la direction FLN de l'Union nationale des étudiants algériens (UNEA). Son activité d'organisation porte aussi sur l'action du FFS en faveur d'un mouvement syndical libre et du combat des femmes pour leur emancipation.

Parallèlement, André Mécili réintègre les services secrets, devenus entretemps Sécurité militaire (SM ). Lorsqu'en réponse à l'assaut de l'armée le FFS soulève la Kabylie, sa position lui permet de  désinformer  le pouvoir sur l'état du mouvement, tout en fournissant à son parti des données précieuses sur les projets répressifs qui le visent. Ses fonctions officielles le conduisent par ailleurs à La Havane, pour le cinquième anniversaire de la révolution cubaine : c'est pour lui l'occasion de discuter avec Fidel Castro et Che Guevara. Il apprécie la fraternité du peuple cubain et relève les efforts faits par les dirigeants en faveur des campesinos.

Le 17 octobre 1964, un an après le début de l'insurrection du FFS, Aït Ahmed et Mécili sont arrêtés ensemble en Kabylie, au cours d'une de leurs rencontres clandestines. Ali Mécili est sauvé de l'exécution par la volonté de négociation d'Ahmed Ben Bella et l'attentisme des services face aux difficultés du régime. Transféré à la prison militaire d'Oran, il est libéré le 1er novembre 1965, peu après le coup d'État de Houari Boumédiène.

Dans l'émigration, du militantisme à l'université.

Début 1966, c'est l'exil en France où le FFS cherche à se réorganiser autour de l'émigration. Arrivé à Marseille en avril 1967, Mécili relance, coordonne et dirige jusqu'au début de 1968 les activités de son parti dans tout le sud du pays . S'élevant contre la tendance à toujours repousser.   

Une démocratisation rendue impossible par les circonstances exceptionnelles que nous sommes censés traverser , il cherche au contraire, par la mise en place de djemaas élues, à appliquer la formule selon laquelle « la démocratie d'aujourd'hui est également la garantie de la démocratie de demain. »

André Mécili prend alors ses distances à l'égard d'une forme de militantisme qu'il estime inadaptée au contexte du moment : en l'absence de débouchés politiques en Algérie, l'activité partisane lui paraît tourner à l'agitation en vase clos. En 1969, à vingt-neuf ans, il entreprend des études de droit et de sciences politiques à Aix-en-Provence. Il les y poursuivra jusqu'à leur terme.

L'avocat parisien, cheville ouvrière de l'opposition algérienne

En 1973, ses examens obtenus et son stage d'avocat effectué, Maître Mécili s'installe à Paris. Son cabinet devient un lieu d'accueil non seulement pour les travailleurs immigrés d'Algérie, mais aussi pour les exilés de toute appartenance nationale ou politique.

À partir de 1975, Ali Mécili reprend une activité politique et s'attache à mobiliser les opposants algériens autour des problèmes de droits de l'homme.

 Ne s'en dissocie pas, pour lui, celui des droits culturels et en particulier du droit à l'existence de la langue et de la culture berbères. En 1978, il fonde à Paris, avec le soutien financier du FFS, une coopérative, Tiwizi, qui se donne pour objet l'édition et la diffusion de publications en langue berbère.

La formation politique est une autre des priorités de Mécili : en 1978 et 1979, il organise et anime plusieurs stages pour de jeunes militants venus principalement de Kabylie. Le séminaire qu'il encadre en mars 1979 aboutit à la publication d'un « avant-projet de plate-forme politique », document de synthèse qui défend, face aux « fictions socialistes » entretenues par le « colonialisme intérieur », la « voie libératrice » d'un socialisme fondé sur « l'autonomie personnelle, locale et régionale ». Beaucoup des participants de ces sessions se retrouveront en 1980 parmi les animateurs du printemps berbère.

André Mécili utilise les contacts tissés au fil des ans pour travailler au rapprochement des différents courants de l'opposition algérienne. C'est lui le principal artisan de l'accord de Londres, conclu le 19 décembre 1985 entre le Mouvement pour la Démocratie en Algérie (MDA) d'Ahmed Ben Bella et le FFS d'Hocine Aït Ahmed. C'est encore lui qui, en août 1986, lance le journal Libre Algérie, auquel collaboreront des militants des deux partis.

En octobre, l'avocat combat avec succès, en alertant l'opinion publique, la tentative d'expulsion de treize militants benbellistes. Il tente également d'obtenir, au nom de la liberté de la presse, le report des mesures d'interdiction prises en décembre 1986 et mars 1987 contre les revues successives du MDA. Ali Mécili interviendra une dernière fois en public, le 22 mars 1987 à Paris, dans une réunion du MDA. La question du terrorisme est encore un domaine où Mécili s'oppose au pouvoir algérien. Lui-même a mis, depuis fin 1985, ses relations et ses talents de médiateur au service de la libération des otages français du Liban. Et il n'a de cesse de dénoncer l'ambiguïté du rôle de l'Algérie vis-à-vis des mouvements terroristes, allant jusqu'à déclarer sur FR3, le 26 mars 1987 : « Quand on est terroriste à l'égard de son peuple, il n'y a qu'un pas à franchir pour l'être aussi sur le plan international  »

Quelques années auparavant, se sachant personnellement menacé, il a écrit dans un texte qui sera trouvé après sa mort : « Lorsqu'on ouvrira cette lettre, se sera accomplie une destinée qui, depuis ma plus tendre enfance, n'aura jamais cessé de hanter mon esprit. Je meurs sous des balles algériennes pour avoir aimé l'Algérie. Je meurs seul, dans un pays d'indifférence et de racisme.  Je meurs pour avoir vu mourir l'Algérie au lendemain même de sa naissance et pour avoir vu baillonner l'un des peuples de la terre qui a payé le plus lourd tribut pour affirmer son droit à l'existence. »

Le 7 avril 1987, Ali André Mécili est assassiné à l'entrée de son immeuble parisien.

                                                                                      

Saïd Sadi

Saïd Sadi
Marié, père de quatre enfants, Saïd Sadi, psychiatre de formation, est né dans une famille de paysans pauvres le 26 août 1947 à Aghribs, en Kabylie. C’est dans ce village soumis aux rigueurs de la guerre qu’il passe son enfance.

L’école y est transformée en caserne. En mars 1959, des militaires annoncent triomphalement la mort du Colonel Amirouche. Les véhémentes dénégations du jeune Saïd SADI lui valurent de visiter le cachot. Il s’était déjà fait remarquer une première fois en refusant d’agiter le drapeau français distribué aux écoliers pour accueillir le Préfet de Haute-Savoie.

 1968 : Etudiant en médecine à l’Université d’Alger, il participe activement, dans des regroupements échappant au contrôle du Parti unique, au renouveau culturel algérien (théâtre, émissions radios, cours de Mouloud Mammeri, etc...). Il connaîtra alors diverses tracasseries de la part des autorités.

 1975 - 1977 : Service National à Sidi-Bel-Abbès.

 1978 : Il conclut une alliance avec Aït-Ahmed au nom d’un groupe de militants du Mouvement Culturel Berbère et réanime le FFS dont il prend la direction pour l’intérieur du pays. Il exerce alors comme médecin à l’hôpital de Tizi-Ouzou.

 1980 : Principal animateur du Printemps Berbère, le Dr Saïd SADI et ses camarades préfèrent agir, par souci d’efficacité, au nom de comités ad hoc plutôt que sous le sigle du FFS.

 7 Avril 1980 : C’est à son initiative que sera organisée la manifestation du 7 Avril 1980 à Alger.

 16 Avril 1980 : C’est encore lui qui est l’auteur de l’appel à la grève générale du 16 avril 1980 première du genre depuis l’indépendance et qui paralysa toute la Kabylie. Par ces deux actions, il inaugure la lutte pacifique contre la dictature, en rompant ainsi avec les traditions de violence qui étaient jusque-là inhérentes au combat politique en Algérie.

 20 Avril 1980 : Arrêté, il est déféré devant la Cour de Sûreté de l’Etat.

 26 Juin 1980 : Sous la pression de la mobilisation populaire, il est remis en liberté provisoire avec les autres détenus déférés devant la Cour de Sûreté de l’Etat. Le procès n’aura jamais lieu.

 Août 1980 : Il participe aussitôt au séminaire de Yakouren au cours duquel est élaboré un dossier sur la question culturelle en Algérie.

 Septembre 1981 : Militant sans cesse pour les libertés publiques, il est la cible des services de répression. Arbitrairement muté à Khenchela, dans les Aurès, suite à un appel à la grève, il refuse de rejoindre son poste et reste sans travail durant une année et demie. Il réintégrera sa place grâce à la solidarité du corps médical.

 Début 1982 : A l’état latent depuis un an, des divergences avec Hocine Aït-Ahmed apparaissent sur la conception de la lutte à mener. Privilégiant l’action sur le terrain, il quitte le FFS, suivi de la quasi-totalité du groupe de militants du mouvement culturel qui militaient dans ce parti.

 Il anime la revue semi clandestine Tafsut paraissant en Algérie.

 1983 : Premiers contacts en vue de la création de la Ligue des droits de l’Homme. Homme d’action mais aussi observateur avisé de notre société, le Dr Saïd SADI a eu une vision prémonitoire de l’évolution du pays, comme en témoignent ces propos parus dans Tafsut  n°7 en juin 1983 :

 Le paysage socio-culturel du pays a été littéralement bouleversé par la courbe démographique notamment. Les hommes, les habitudes, les aspirations et les besoins ne sont plus les mêmes ; la structure, elle, reste invariable. Alors fatalement ce sera le choc. Comme on n’a ni la capacité ni la volonté de s’adapter on essaie de raccommoder, mais le replâtrage craque aussitôt.  Il y a maintenant inadéquation système/société. Les contradictions s’amoncellent, le discours s’use.

 Et quand on arrive à ce stade, tout pouvoir, quelle qu’en soit la nature, est tenu de composer : intelligemment ou dans la violence.

 Sur les facilités accordées de facto au courant intégriste par un système à parti unique et qui a, de surcroît, opté pour l’islam religion d’Etat, il ajoutait ceci : Autant il est difficile à notre mouvement de se retrouver ne serait-ce que physiquement, autant cette tendance [les intégristes] trouve, chaque vendredi que Dieu fait, un lieu de réunion organique au niveau des mosquées.

 10 février 1985 : Il est enlevé au tribunal de Tizi-Ouzou alors qu’il venait apporter son soutien à des fils de Chahids (orphelins de guerre) qui devaient être jugés ce jour-là. Il sera libéré au bout d’une semaine avec ces mêmes fils de chahids.

 Son activité politique pacifique l’amène naturellement à être le pivot autour duquel se constituera la première ligue algérienne des droits de l’Homme (1983-1985).

 21 août 1985 : Le Dr Saïd SADI, arrêté comme membre fondateur de la ligue, sera déféré une nouvelle fois devant la Cour de Sûreté de l’Etat.

 17 décembre 1985 : Comparution devant le Cour de Sûreté de l’Etat. Lors de son audience devant la Cour le 17 décembre 1985, il dénonce la faillite de la gestion du FLN qui a engendré une inquiétante déliquescence sociale :

 Pourquoi voudriez-vous que l’Algérien se mobilise lorsqu’on lui demande précisément de s’effacer ?

 Pourquoi voudriez-vous qu’il fasse le moindre effort, quand il constate que, depuis le niveau de sa commune, les gens chargés de le représenter sont toujours désignés parmi ces militants `` engagés, intègres et compétents ", c’est-à-dire les individus les plus honnis de la communauté, qui disparaissent de la scène une fois leur magot fait ?

 Pourquoi la jeunesse suivrait-elle, quand on sait qu’en 1981 déjà et pour la seule tranche d’âge allant de 16 à 19 ans, 1.200.000 des siens étaient dans la rue ? Ni dans le circuit scolaire ni même occupés par le Service National [...]

 Qui réfléchit et produit sur le blocage de notre société ?

 Qui s’interroge sur les causes réelles de l’ascension fondamentaliste et de ses évolutions ?

 Parlant des risques d’explosion sociale que le pouvoir s’entête à nier, Saïd SADI lancera : `’le jour où il faudra tirer sur la foule, car on y arrive, (vous) l’ordonnerez en toute bonne conscience ! `’.

 Au terme de ce procès, Saïd SADI est condamné à la peine la plus lourde rendue dans ce jugement : trois ans de prison ferme et cinq mille dinars d’amende. Il est incarcéré dans le très rigoureux pénitencier de Tazoult-Lambèse.

 Pendant sa dernière détention (1985-1987), et dans des conditions extrêmement pénibles, Saïd SADI s’occupe à achever ses études de spécialité en psychiatrie. En juin 1986, il passe les épreuves en prison et termine major de promotion. Six mois après, sur injonction des services de sécurité, l’examen est invalidé par le ministère de la santé. Deux années plus tard, libéré, il reprend les mêmes études et se voit consacré de nouveau major de promotion.

 Avril 1987 : Après de nombreuses protestations des organismes humanitaires et presque deux années de prison, il est libéré avec les derniers membres de la ligue encore détenus, par une grâce présidentielle.

 Année 1988, il active pour la mise en place de la première section de Amnesty International qui sera présidée par le professeur Bencheikh.

 Octobre 1988 : Avec trois de ses camarades, il appelle à la tenue des assises nationales du Mouvement Culturel Amazigh.

 9 et 10 février 1989 : Tenue des assises du Mouvement Culturel Amazigh qui se terminent par la création du RCD (Rassemblement pour la Culture et la démocratie). Le Dr. Saïd SADI est élu à sa tête au poste de Secrétaire Général.

 Les résolutions adoptées par l’assemblée plénière revendiquent :

 -  Le pluralisme politique non encore officiellement adopté,
-  L’abolition du Code de la famille qui instaure la discrimination entre les sexes,
-  La réhabilitation officielle de l’identité algérienne dans sa triple dimension amazigh, arabe et musulmane. La prise en compte de la francophonie qui doit être considérée comme un enrichissement et non comme une aliénation,
-  La liberté syndicale afin de garantir une réelle justice sociale en même temps que la modernisation de l’économie qui doit intégrer la liberté d’entreprise,
-  Enfin, pour la première fois en Algérie, un parti politique fait de la séparation des champs politiques et religieux un des fondements de la démocratie.

 Rapidement, ces revendications finissent par constituer le cœur des programmes du courant démocratique.

 12 Juin 1990 : Elections municipales. Le RCD enlève 87 communes avec 160 000 voix, mais les intégristes qui avaient bénéficié du monopole de la parole dans plus de dix mille (10 000) mosquées et du contrôle du système éducatif avec le FLN pendant trente ans, s’assurent la mainmise sur près de 900 communes sur les 1 541 existant.

 26 Décembre 1991 : Le premier tour des élections législatives aboutit à un raz-de-marée intégriste. Dans ce scrutin marqué par une forte abstention (42%), le camp démocratique divisé, réalise moins de un million de voix.

 De tous les nouveaux partis, le RCD est le seul à émerger avec 200 000 voix. Les intégristes obtiennent près de 4 millions de voix, le F.I.S. totalise 24% des électeurs inscrits.

Sûrs de leur fait, les dirigeants du F.I.S.multiplient déclarations et communiqués dans lesquels ils affirment leur détermination à appliquer la chari’a, annoncent la fin de l’alternance et des élections, l’instauration de tribunaux islamiques et invitent les Algériens à changer leurs habitudes vestimentaires et alimentaires.

 Un affolement général s’empare de la population. On parle de boat-people en Méditerranée. Des pays limitrophes menacent de fermer leurs frontières. Le leader du F.I.S. d’alors clame que chaque bateau d’Algériens qui quitte le pays sera remplacé par deux bateaux de fidèles Soudanais.

 Dans ce climat de panique généralisé, le Dr Saïd SADI lance un appel solennel à l’interruption du processus électoral : `` Je ne veux pas aller à l’enterrement de mon pays " dira-t-il (30 décembre 1991). Un instant désorientés par cet appel, nombreux sont les citoyens qui finissent par s’y rallier.

 L’appel sera entendu par les plus hautes autorités. Un Haut Comité d’Etat (HCE) est mis en place (14 janvier 1992), Mohamed Boudiaf en assure la présidence après un exil de trente ans. Le Dr Saïd SADI aura plusieurs tête-à-tête avec lui. Après l’assassinat du Président Boudiaf (29 juin 1992), le désespoir gagne les cœurs. La classe politique démissionne, des responsables quittent le pays.

 Décembre 1992 : C’est dans ce contexte de démission généralisée que le Dr Saïd SADI, resté parmi les siens dans cette tourmente, fait ses propositions à la Nation dans sa ’’Plate-forme pour l’Algérie républicaine’’.

 10 Novembre 1993 : Il lance un appel à la tenue des Etats Généraux des patriotes républicains dans lequel il écrit : `` La République, pour nous, c’est la garantie des droits et des chances pour les plus humbles. "

 25 Novembre 1993 : Cinq mille cadres, syndicalistes, anciens maquisards, entrepreneurs répondent à cet appel et créent le Mouvement Pour la République (MPR).

 Fin 93 - début 94 : Comme Président du MPR, il anime des meetings à travers tous le pays : à Annaba, dans la salle même où le Président Boudiaf a été tué, à Oran, à Constantine, comme à Hassi-Messaoud, il rencontre à chaque fois un accueil populaire chaleureux.

 Saïd SADI dans une campagne de proximité, en 1997, à Alger.

 Peu formés à l’action militante, les adhérents à ce mouvement tombent sous les balles intégristes. Le S.G. du M.P.R. échappe miraculeusement à un attentat, deux cadres furent assassinés à Annaba, un autre manque de se faire enlever de son domicile.

 La dynamique de mobilisation enregistrée les premiers mois a dû être freinée dans la tourmente de l’année 94-95 pour préserver la vie des membres du M.P.R., entraînant, de fait, un gel volontaire, des activités de cette formation.

 21 Mars 1994 : Devant la barbarie des assassinats intégristes qui prennent pour cibles non les barons du système mais tous ceux qui refusent de se soumettre à l’ordre intégriste : femmes, syndicalistes ou militants de l’opposition démocratique en général et face à l’incapacité de l’Etat d’assurer la sécurité des citoyens, Saïd SADI lance un appel à la résistance.

 29 Juin 1994 : Lors de la marche organisée à Alger à l’appel du MPR, l’attentat à la bombe qui visait Saïd SADI fait deux morts et 71 blessés.

 1994 - 1995 : A travers tout le territoire national, Saïd SADI rend visite à plusieurs comités de résistance, il se rend notamment à Zbarbar, fief des GIA..

 11 Septembre 1995 : Saïd SADI se porte candidat à l’élection présidentielle de novembre 1995. Malgré une fraude en faveur du candidat de l’armée Liamine ZEROUAL, malgré les manipulations opérées dans la nuit du 16 novembre, Saïd SADI obtient un million deux cents mille voix, ce qui représente près de deux fois le total des suffrages recueillis jusque-là par tous les partis démocrates.

 Juin 1997 : Saïd SADI , tête de liste, est élu député d’Alger où le RCD remporte 15 des 24 sièges à pourvoir. Seuls 4 sièges lui seront restitués. Toute la presse algérienne s’accorde à dénoncer une fraude qui a d’abord affecté le RCD.

 23 octobre 1997 : Aux élections locales, la fraude s’amplifie et disqualifie, devant les opinions algérienne et étrangère, le scrutin.

Dès le 24 octobre, Saïd SADI prend la tête d’une manifestation à Alger, lançant ainsi la fameuse protesta d’Alger. Des dizaines de milliers de manifestants relaient l’initiative appuyée par d’autres partis et occupent, en octobre et novembre, les rues de la capitale pendant trois semaines.

 Comme pour la présidentielle de novembre 1995, les élections législatives de juin 1997 montrent que dans l’importante communauté émigrée, où la fraude est moins aisée, le RCD arrive en tête dans la plupart des circonscriptions.

 Février 1998 : Saïd SADI est élu président du RCD par mille deux cents délégués réunis à l’occasion du deuxième congrès du Rassemblement. Cette rencontre a inauguré une nouvelle pédagogie en ouvrant toutes les séances à la presse nationale et étrangère, ainsi qu’à la quasi totalité des chancelleries présentes à Alger et à l’ensemble des délégations étrangères.

 Décembre 1998 : A la veille de l’élection présidentielle anticipée de 1999 et devant la pléthore des représentants du régime en place depuis 1962, la candidature de Saïd SADI apparaît comme celle de l’espérance démocratique.

 En cette période de confusion, la constance et la justesse de ses positions politiques ont fait de Saïd SADI un repère.

 Une lutte de longue date contre la dictature du parti unique payée par des années de prison et son combat contre l’intégrisme, mené à l’intérieur du pays, font de Saïd SADI, homme de conviction et étranger à la génération qui a mené le pays à la faillite, le candidat naturel de l’opposition démocratique.

 Face à l’impasse algérienne, il apparaît, désormais, comme le recours pour l’Algérie républicaine et démocratique.

 Février 99 : Saïd SADI prend contact avec la plupart des candidats pour leur proposer d’exiger, ensemble, des garanties juridiques et administratives à même de respecter et de protéger l’expression électorale des citoyens, notamment la révision de la loi électorale, la présence en nombre suffisant d’observateurs étrangers, le dépouillement quotidien des bulletins des émigrés dont le vote s’étale sur 4 jours ..., etc....

 Chacun supputant que la fraude lui sera favorable, les candidats, tous issus du système FLN, refusent.

 Mars 99 : Pressé toujours par les citoyens de se présenter à l’élection présidentielle anticipée du 15 avril, Saïd SADI préfère appeler au boycott du scrutin, jugeant qu’il n’offre aucune garantie de crédibilité.

 Avril 99 : L’appel du Dr SADI au boycott rencontre un grand écho chez les citoyens, en particulier dans l’émigration.

 Septembre-Décembre 1999 : Devant la décision du Président Abdelaziz BOUTEFLIKA d’ouvrir les chantiers de l’éducation nationale, du code de la famille, de l’administration, de l’économie, de la justice et, après de larges et longs débats au sein du Rassemblement, le Dr SADI annonce la participation du RCD dans le gouvernement où il se voit confier deux portefeuilles ministériels.

 Janvier 2001 : Après une année de participation du RCD au gouvernement et devant le recul accusé par le programme des réformes, la confusion caractérisant la décision d’Etat, l’absence de concertation de la part du Président de la République, le Président du RCD Saïd SADI déclare dans une interview, au quotidien « le Soir d’Algérie » :

 « Les dix premières mois du mandat présidentiel ont constitué une amorce que de nombreux acteurs politiques et socio-économiques nationaux et autres observateurs étrangers avaient considéré comme un élan salutaire à bien des égards... Le refus de consulter et d’informer ou les tentations bonapartistes qui s’expriment à travers les mesures qui pèsent sur la presse ou la saisine abusive du Conseil Constitutionnel pour réduire les prérogatives du pouvoir législatif constituent des sources de tension dont il vaut mieux faire l’économie... »

 « ...Nous vivons une période charnière qui termine un cycle lourd de notre histoire contemporaine. Il s’agit de se préparer à gérer, au mieux, la prochaine étape du destin de l’Algérie. »

 Janvier 2001, de Casablanca : A la tête d’une délégation du RCD, Saïd SADI lance un appel à un Forum d’intégration Nord-africaine, lors de la rencontre des partis méditerranéens de gauche le 5-6-7 janvier, à Casablanca, au Maroc.

 8-13 avril 2001 : Sur invitation des autorités de la République d’Afrique du Sud, Saïd SADI effectue une visite dans ce pays.

 Longuement reçu par le Président Thabo M’BEKE, les dirigeants de l’ANC, du parti communiste et de la COSATU, premier syndicat d’AFS, le Président du RCD s’entretient par ailleurs avec des universitaires ainsi que les organisations de la société civile, notamment celles des Droits de l’Homme et la fameuse Commission Vérité et Réconciliation.

 29 Avril 2001 : Suite à la répression sanglante infligé aux citoyens dans les wilayas de Tizi-Ouzou, Bougie et Bouira, le Président du RCD anime une conférence de presse, à Alger. Après avoir annoncé la convocation d’une session extraordinaire du Conseil National pour trancher sur la participation du RCD au gouvernement, il déclare : « Mon sentiment personnel profond est que nous ne pouvons rester dans un gouvernement qui tire sur la foule »

 1ier Mai 2001 : A la sortie de la session extraordinaire du Conseil National qui prononce solennellement le retrait du Rassemblement du gouvernement, le président du RCD anime un point de presse où il appelle au « rassemblement des forces démocratiques du pays » pour trouver une issue à la crise non sans avoir rappelé que « le RCD a accompagné et encadré ce mouvement... en se souciant d’abord de la préservation des vies humaines ... » précisant à l’attention des familles des victimes de la répression que « les structures locales du RCD sont à leur disposition pour toute démarche, aide ou protection ».

 29 Mai 2001 : Alors même que la Kabylie est au centre d’une tragédie sanglante, Said SADI écrit une lettre à Mr Hocine Ait Ahmed, Président du F.F.S. dans laquelle il réitère la disponibilité du RCD au rassemblement démocratique notant que « la synergie de notre engagement solidaire peut créer une dynamique républicaine populaire et pérenne historique dans la capitale et le pays ».

 Dans la même missive, le Président du RCD réaffirme à M. Ait Ahmed : « ... il est toujours attendu de nous, de prendre acte des appels de l’Histoire présente et future... », précisant qu’il s’agit de « montrer des disponibilités nouvelles devant une dérive aux conséquences imprévisibles ... »

 Cette lettre historique a été transmise après que le FFS ait décliné l’offre des partis du RCD et du P.T de participer à la marche du 31 Mai à laquelle il avait appelé. ( Pour de plus amples détails sur cet épisode, voir dans la rubrique « Archives » les bulletins Internet des mois de Mai et Juin 2001 ).

 21 Juin 2001 : Avec les responsables d’autres formations et mouvements ( FD - CCDR - MDS - MLD et ANR ), Said SADI participe à la proclamation de la naissance de la Coordination des Démocrates Algériens. Ces responsables appellent « toutes les forces patriotiques et démocratiques à se joindre dès maintenant à cette entreprise de sauvegarde nationale ».

 

 

 

Après l’indépendance de l’Algérie, la Kabylie se retrouvera vite sur le devant de la scène politique algérienne.

Hocine Aït Ahmed, en désaccord avec la politique suivie par Ahmed Ben Bella, annonce le 29 septembre 1963 la création du Front des forces socialistes (FFS).

À la suite de la " guerre des sables " (l’affrontement, entre l’Algérie et le Maroc), les troupes de l’ANP (l’Armée nationale populaire) ouvrent le feu sur des soldats de la 7e région en Kabylie. L’ANP pénètre à Azazga sans rencontrer de résistance.

Hocine Aït Ahmed et ses partisans prennent alors le maquis. Cette résistance en Kabylie contre un pouvoir jugé autoritaire est le premier cas larvé de guerre civile dans l’Algérie indépendante. Arrêté puis condamné à mort,

Hocine Aït Ahmed s’évade de sa prison en 1966, et vivra en exil en Europe. La Kabylie entrera de nouveau en dissidence contre le pouvoir central, quinze ans plus tard, en avril 1980.

 À la suite de l’interdiction d’une conférence de l’écrivain Mouloud Mammeri, de violentes émeutes secoueront cette région pendant plusieurs semaines,une nouvelle génération entre en scène, le docteur Saïd Saadi et le chanteur Ferhat Mehenni.

Ces nouveaux acteurs politiques et culturels porteront publiquement les revendications touchant à l’enseignement de la culture berbère, totalement ignoré par les gouvernements successifs lancés dans une politique d’arabisation de l’enseignement. Le " printemps berbère " sera le premier signal, violent, de remise en cause de la culture du parti unique, le FLN, qui s’effondrera dans les émeutes d’octobre 1988.

 

 

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021